La période des fêtes publicitaires est souvent synonyme de surenchère : des lutins hyperactifs, des camions rouges qui klaxonnent et des tables qui croulent sous la dinde. C’est bruyant, c’est joyeux, c’est Noël.
Mais parfois, une marque décide de couper le son, de ralentir la cadence et de miser sur quelque chose de beaucoup plus risqué : l’émotion brute et mélancolique. C’est le pari audacieux que prend Uber cette année pour sa toute première campagne nationale dédiée aux fêtes aux États-Unis et au Canada. Oubliez la fonctionnalité de l’application, ici, on parle de ce qui se passe dans la tête des passagers.
Un trajet plus lourd que les valises
Pour ce baptême du feu sur le créneau ultra-competitif de Noël, l’application de VTC a renouvelé sa confiance à l’agence Mother. Après avoir exploré la vie de banlieue dans le film « In Good Time », ils reviennent avec « Close ». Le pitch est d’une simplicité désarmante, mais l’exécution est chirurgicale. On y suit une jeune femme à l’aéroport. Elle commande son Uber, monte à bord, et le voyage commence.
Mais ce n’est pas un trajet d’un point A à un point B. À travers la vitre arrière, alors que les rues pavillonnaires de son enfance défilent, c’est toute sa vie qui remonte à la surface. Le réalisateur Michael Spiccia (de la société de production MJZ) capture avec finesse ce moment suspendu où l’on rentre chez soi pour les fêtes, le ventre noué. On comprend vite que la destination n’est pas le plus important. C’est la confrontation à venir qui compte. La protagoniste ne rentre pas juste pour manger de la bûche, elle revient pour se réconcilier avec son père après une dispute passée dont on devine les cicatrices.
L’idée créative, résumée par Felix Richter, directeur de la création chez Mother, était de « montrer un voyage émotionnel à l’intérieur d’un voyage réel ». Et c’est réussi. La voiture devient ce sas de décompression, cette bulle intime où l’on répète ce qu’on va dire, où l’on doute, et où l’on observe le temps qui a passé sur les façades des maisons voisines.
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James Blake et Fleetwood Mac : le cheat code émotionnel
Si les images sont belles, c’est la bande-son qui fait basculer le film dans une autre dimension. Pour accompagner cette histoire de temps qui passe et de relations familiales complexes, Uber n’a pas choisi un jingle joyeux. La marque s’appuie sur une reprise du mythique titre « Landslide » de Fleetwood Mac, interprétée par James Blake.
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Le choix est tout sauf anodin. Les paroles de la chanson originale parlent de changement, de vieillesse et de la peur de voir sa vie évoluer (« I’ve been afraid of changing »). La voix spectrale et hantée de James Blake vient renforcer cette atmosphère d’introspection. La musique ne sert pas ici à combler le vide, elle structure la narration. Elle porte le silence de la voiture et amplifie les regards perdus dans le vague. C’est une masterclass d’utilisation sonore qui rappelle que la publicité, quand elle arrête de crier, peut raconter des histoires universelles.

L’émotion au service du service
Pourquoi Uber se lance-t-il dans le mélodrame familial ? La réponse est stratégique. Comme l’explique Georgie Jeffreys, responsable marketing d’Uber en Amérique du Nord, la marque souhaite célébrer « les moments calmes que nous avons pour réfléchir ». L’insight est juste : pendant les fêtes, entre le chaos des aéroports et le bruit des réunions de famille, le trajet en Uber est souvent le seul moment de solitude.
En se positionnant comme le facilitateur de ces retrouvailles, Uber dépasse son statut d’utilitaire. La marque ne vous vend plus une course rapide ou un chauffeur sympa, elle vous vend le rapprochement. Elle est le lien physique qui permet la réparation émotionnelle.
Diffusée au cinéma, en CTV (télévision connectée), en vidéo en ligne (OLV) et sur les réseaux sociaux, cette campagne « Close » marque une étape de maturité pour l’annonceur. Il ne s’agit plus de dire « nous sommes là quand vous avez besoin d’un transport », mais « nous sommes là quand vous avez besoin de rentrer ». Une nuance sémantique qui, portée par une réalisation léchée et une musique poignante, risque de faire couler quelques larmes outre-Atlantique.
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