Faire de l’art à partir d’un sujet tabou n’est jamais simple. Mais quand il s’agit de sensibiliser au cancer du côlon, certaines idées méritent qu’on s’y assoie… littéralement.
Aux États-Unis, l’agence Chemistry et l’organisation Georgia CORE (Center for Oncology Research & Education) ont lancé une campagne choc intitulée “Weird Looking Stools”. Son concept ? Exposer des tabourets conçus pour représenter les symptômes physiques du cancer colorectal, afin de briser le silence autour de la maladie.
Quand l’art s’invite dans les toilettes publiques (ou presque)
Oubliez les affiches santé au ton moralisateur. Ici, la campagne mise sur le design et la curiosité pour capter l’attention. Chaque tabouret, imaginé par Julian Scalia, directeur artistique sur plusieurs films du Marvel Cinematic Universe, illustre un symptôme du cancer du côlon : formes anormales des selles, douleurs abdominales, saignements ou perte de poids inexpliquée. Des sujets rarement évoqués, mais qui méritent pourtant toute l’attention du public.
Installées dans des cafés, bars et lieux culturels de l’État de Géorgie, ces pièces intriguent d’abord par leur esthétique étrange avant de révéler leur sens profond. À côté de chaque tabouret, un QR code renvoie vers un site regroupant des ressources sur la prévention, le dépistage et le diagnostic précoce. L’idée est simple mais brillante : provoquer une conversation là où on ne l’attend pas, dans des espaces de sociabilité plutôt que dans les couloirs froids d’un hôpital.
“Si tu vois quelque chose de bizarre dans ton bar, tu vas forcément te demander pourquoi”, explique l’équipe de Chemistry. Et c’est précisément cette réaction instinctive que la campagne exploite pour transformer la gêne en discussion utile.
Un message de santé publique amplifié par les médias
Au-delà de l’installation artistique, “Weird Looking Stools” s’appuie sur un dispositif média complet. En parallèle des expositions physiques, 50 panneaux d’affichage ont été déployés à travers la Géorgie, avec 19 autres prévus dans les semaines suivantes. La campagne est également présente sur les réseaux sociaux et bannières digitales, pour rediriger le public vers le site d’information et encourager les dépistages préventifs.
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Ce travail de terrain et de communication s’adresse en priorité aux 25-54 ans, un groupe souvent sous-informé, alors que l’incidence du cancer colorectal augmente chez les jeunes adultes. D’après le CDC (Centers for Disease Control and Prevention), cette maladie est aujourd’hui la deuxième cause de mortalité par cancer aux États-Unis. Pourtant, détectée tôt, elle est hautement curable. C’est précisément ce paradoxe que la campagne veut combattre.
Quand la créativité devient un outil de santé publique
Cette initiative s’inscrit dans une tendance forte du marketing social : utiliser la créativité comme déclencheur d’action. On l’a vu récemment avec d’autres campagnes de sensibilisation qui osent bousculer les codes, de la prévention du VIH à la santé mentale. En 2025, les campagnes de santé publique qui marquent ne sont plus celles qui expliquent, mais celles qui font ressentir.
En détournant un objet du quotidien pour illustrer un sujet de santé intime, “Weird Looking Stools” réussit à rendre visible l’invisible. Et surtout, elle replace la conversation au bon endroit : dans la vie réelle, entre amis, autour d’un café.
Une belle preuve que, parfois, la communication la plus puissante naît de l’inconfort. Et qu’un tabou bien cassé peut valoir bien plus qu’une campagne bien lissée.
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