Dans le monde de la communication, il existe des icônes auxquelles on n’ose pas toucher. Le ruban rouge en fait partie. Depuis les années 90, cette boucle épinglée au revers des vestes est le symbole universel de la lutte contre le sida.
Mais parfois, pour réveiller les consciences et briser l’inertie, il faut savoir bousculer les codes, quitte à déstabiliser visuellement le public. C’est exactement le pari pris par l’association AIDES et son agence BETC à l’occasion de cette journée mondiale de lutte contre le sida. Une campagne qui prouve qu’un simple changement d’inclinaison peut avoir autant d’impact qu’un long discours.
Un accident visuel pour capter l’attention
L’idée créative frappe par sa simplicité. Le ruban rouge a toujours représenté un « V » de la victoire inversé, une promesse qu’il serait retourné le jour où la maladie serait enfin éradiquée. Mais en 2025, alors que la victoire médicale totale se fait encore attendre, une autre victoire a déjà eu lieu, plus silencieuse mais cruciale : celle des traitements.
Pour la mettre en lumière, AIDES et BETC ont décidé de faire pivoter le symbole. Ce 1er décembre, sur les plateaux télé, sur les vestes des journalistes et sur les réseaux sociaux des influenceurs, le ruban n’est pas droit. Il est à l’horizontal. Ce n’est pas une erreur d’épingle ou une négligence vestimentaire, c’est un « accident visuel » volontaire.
En créant cette dissonance, la campagne force le spectateur à s’interroger, à pencher la tête et, symboliquement, à changer de perspective sur le sujet. Comme le résume bien Stéphane Xiberras, président de l’agence, c’est la définition même d’une bonne idée : réussir à dire beaucoup avec très peu d’artifice.
L’équation i=i : la science avance, les mentalités stagnent
Pourquoi ce besoin de bascule ? Parce qu’il y a un décalage immense entre la réalité scientifique et la perception du grand public. Depuis 2019, un consensus scientifique est établi : une personne séropositive sous traitement efficace a une charge virale indétectable, et par conséquent, ne transmet pas le virus. C’est le principe de i=i (Indétectable = Intransmissible).
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Pourtant, la sérophobie, nourrie par la peur et l’ignorance, reste tenace. Beaucoup voient encore le VIH à travers le prisme des années 90, ignorant que les personnes sous traitement peuvent vivre une vie sentimentale et sexuelle sans risque pour leurs partenaires. En faisant basculer le ruban, la campagne matérialise ce besoin urgent de mise à jour collective.
L’objectif n’est plus seulement de soutenir la recherche, mais de diffuser cette information libératrice qui peine à passer la barrière des préjugés. Le ruban devient ainsi le trait d’union, le signe « égal » de cette équation vitale que l’association martèle sur tous les supports, du DOOH à la presse.
La force de la jeunesse créative
Ce qui rend cette campagne encore plus pertinente, c’est sa genèse. On pourrait penser qu’une idée touchant à un symbole aussi historique vient de directeurs de création chevronnés. Surprise : elle est née au sein de la BETC Academy.
Ce programme, conçu pour dénicher et former les jeunes talents en conditions réelles, a permis à des regards neufs de se poser sur ce brief complexe. C’est souvent là que réside la clé des grandes campagnes sociétales : ne pas s’encombrer du poids du passé pour proposer une vision radicale. Séduite par la justesse de cette proposition, AIDES a choisi de la déployer au niveau national.
C’est une belle preuve que la créativité n’est pas une question d’années d’expérience, mais de capacité à voir ce que les autres ne voient plus. Grâce à ces jeunes créatifs, le ruban rouge ne se contente plus d’être un signe de solidarité, il devient un outil pédagogique.
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